
                                                             « Les femmes ne sont pas le problème, elles sont la solution. »
“En Chine, un proverbe dit que les femmes portent la moitié du ciel.
Mais ça n’est pas la réalité. Dans une  grande partie du monde, les femmes et les filles sont victimes de trafic  humain, de viols de masse, et pire encore.
Leur tendre la main, voilà quelle est la  meilleure arme contre la pauvreté et l’extrémisme. Les femmes ne sont  pas le problème, elles sont la solution.”
Partie au Congo dans le cadre de ses études, Harper n’en est  jamais véritablement revenue. Après avoir travaillé pour l’hôpital Heal  Africa, elle est aujourd’hui coordinatrice pour l’Eastern Congo  Initiative, une organisation lancée il y a un mois par l’acteur et  réalisateur Ben Affleck.C’était il y a quatre ans. À peine âgée  de 23 ans, Harper s’envolait pour Goma. Point de chute : l’hôpital  dirigé par l’association Heal Africa, au cœur du conflit qui déchire la  République Démocratique du Congo. Un « sanctuaire de dignité», d’après  Nicholas Kristof et Sheryl WuDunn. La jeune étudiante du Minesotta  pensait partir quelques semaines. Aujourd’hui, le Congo est sa «  deuxième maison ». Et si elle a bel et bien bougé, ce n’est que de  quelques centaines de mètres : elle coordonne désormais les actions de  l’Eastern Congo Initiative, une très récente organisation fondée par  l’acteur et producteur Ben Affleck. Son ambition : soutenir les  organismes locaux et venir en aide aux anciens enfants soldats et aux  victimes de violences sexuelles. Harper, qui parle couramment le  swahili, a transplanté quelques-unes de ses racines dans la terre de  Goma : « C’est très difficile d’imaginer qu’un jour, je quitterai le  Congo. »Au sein de Heal Africa, Harper a créé le programme Healing Arts.  Il propose aux femmes en attente de soins (majoritairement d’opérations  de fistules) de se former à l’artisanat. En apprenant à coudre, à  tresser des paniers, à fabriquer des savons ou du pain, elles acquièrent  un savoir-faire qui leur permettra de subvenir à leurs besoins, une  fois sorties de l’hôpital. « La semaine dernière, j’ai emmené un  visiteur à Healing Arts, raconte-t-elle. Je n’étais pas allée dans le  centre depuis plusieurs mois, et nous étions dimanche. Mais l’une des  mères des patients nous a ouvert la porte, a très clairement expliqué au  visiteur ce qu’était l’association, quel était son objectif, et elle  lui a même vendu quelques objets. Je n’ai pas pipé mot ; pourtant, elle  n’est pas véritablement membre du programme. Ces moments-là sont  inoubliables. »« La clé, pour convaincre les gens d’agir, conclut-elle,  c’est de ne pas faire du mouvement en faveur des femmes un mouvement qui  pointe du doigt les méchants hommes oppressant les pauvres femmes. Au  contraire, c’est un mouvement rassembleur, qui réclame l’égalité parce  qu’elle est bénéfique à tous : aux femmes, aux filles, aux familles  entières, à la communauté. »
De leur côté, les auteurs de La Moitié du ciel,  qui consacrent un chapitre à Harper et à Heal Africa, déplorent le  système scolaire américain qui envoie ses étudiants à Oxford, Florence  ou Rome. Jamais dans des pays en voie de développement. «Pour s’attaquer  efficacement à un problème, écrivent-ils, il faut d’abord le  comprendre. Et il est impossible de comprendre une question en se  contentant de lire des livres. Il faut voir la réalité par soi-même, et  même y être directement confronté. »
L’hôpital Heal Africa accueille régulièrement des volontaires.
« Je ne voulais  pas tuer ma fille. Mais mes voisins sont venus, et m’ont dit : “Tu as  trois filles, il faut en tuer une. Tu as assez de deux filles. Comment  tu vas les nourrir, les marier ? Une fille, ça ne sert à rien.” Ma  famille disait la même chose. Mais moi je n’arrivais pas à la tuer. Elle  était très belle, presque trop. Elle devait être faite pour mourir.  Elle est née à la maison, à quatre heures du matin. Les voisins m’ont  dit : on va la tuer avec du jus de tabac. Ils ont préparé la mixture  avec du tabac écrasé. Moi je ne voulais pas le faire. En priant Dieu le  matin, je lui ai donné une cuillère de jus de tabac. J’étais très  triste. Je me suis allongée à côté d’elle. Je n’arrivais pas à la  regarder. Mais l’enfant n’est pas morte tout de suite, elle n’est morte  que le soir. Je n’ai pas supporté. J’ai dit à ma mère : “ Il faut la  sauver, lui donner du jus de sucre pour la réveiller. ” Ma mère lui en a  donné, mais c’était trop tard. Ma petite fille est morte. Ma mère l’a  enterrée dans le jardin, derrière notre maison. Moi, je ne pouvais pas.  J’ai planté un arbre et des fleurs à cet endroit. Ma petite fille aurait  dix ans aujourd’hui. Je n’arrive pas à l’oublier. C’est impossible. Je  ne peux pas l’oublier. »
Ces mots, recueillis par Manon Loizeau  dans son très beau documentaire, «La Malédiction de naître fille», sont  ceux d’Indrani, une Indienne de l’État du Tamil Nadu. En Inde, au  Pakistan et en Chine, nous rappelle la journaliste et préfacière de La Moitié du ciel, naître fille est une malédiction – « aujourd’hui, presque un miracle »

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